Une Petite Fille Privilégiée - Une enfant dans le monde des camps 1942-1945

Une Petite Fille Privilégiée - Une enfant dans le monde des camps 1942-1945, de Francine Christophe.

"Je fus une petite fille privilégiée, parce que mon père avait été prisonnier. Et aussi curieux que cela paraisse, c'est ce qui me sauva la vie...

Bergen-Belsen, j'en reviens, cinquante ans que j'attendais ce moment-là ! Lorsque j'ai franchi la grille, quelque chose m'a arrêté tout net : les oiseaux... ça chantait partout... On me demande s'il n'y avait pas d'oiseaux dans les camps. Je ne sais pas. Peut-être qu'il y en avait, mais on ne les voyait pas, on ne les entendais pas, parce qu'on voyait et qu'on entendait bien autre chose. A Bergen, maintenant, les oiseaux chantent partout.

Ah ! qu'il est beau mon camp !
J'étais toute fière. Il faut dire que lorsque j'avais onze ans et que j'y passai un an, il n'était pas beau comme cela. Le typhus y sévissait, et comme l'épidémie se propageait, les troupes anglaises ont dû tout brûler, même le four crématoire. Alors j'ai marché, marché, presque les mains tendues comme un aveugle, cherchant des points de repère, essayant de situer ma baraque, mon infirmerie, ma place d'appel.
Rien. Tout est beau, tout est vert, tout est paisible, même la sombre forêt est traversée par les rayons du soleil. Il y a bien de temps en temps de gros monticules indiquant : "Ici 5 000 morts ; ici 2 000 morts, ici nombre de morts inconnu". Mais les oiseaux chantent. Pour un peu je me serais couchée dans l'herbe.
Et puis, dans le musée, j'ai vu les photos des charniers, la charrette aux morts, les mourants dans la boue. Alors je me suis calmée, j'avais retrouvée mon enfance..."

Francine Christophe.

En vente à la fondation. Contacter le secrétariat au 01.47.05.81.50 ou par courriel secretariat@fmd.asso.fr